
Quel amateur de vin qui se respecte n’a jamais connu une telle expérience ? On ouvre une belle bouteille avec impatience et fébrilité, puis au moment de la déguster c’est le drame, le vin a un goût de liège, de moisi…. bref le vin est bouchonné !
Mais est-ce vraiment la cas ?
En effet, le goût de bouchon n’est pas si évident à détecter, et pour cause :
- d’abord, parce que chaque être humain a un seuil de perception différent des molécules du goût de bouchon (les gens y sont, donc, plus ou moins sensibles).
- ensuite, car on peut avoir une sensation de moisi sans que cela ne soit dû à un problème de bouchon.
- enfin, car parfois il peut y avoir confusion avec d’autres défauts.
(Re)Connaître le goût de bouchon
Quels sont les arômes derrière ce fameux goût de bouchon ?
Et bien on décrit souvent un vin bouchonné comme moisi, putride, avec des odeurs de poussière ou de terre humide. En plus le vin perd en arômes et devient de ce fait beaucoup moins aromatique.
Je vous ai parlé plus haut des molécules responsables du « goût de bouchon », et non de la molécule. Cela mérite une explication :

La molécule a s’appelle en réalité le 2,4,6 Trichloroanisole ou TCA. Elle évoque surtout des odeurs de liège moisi. Dans 95% des cas, les TCA sont apportés par le bouchon
La molécule b s’appelle le 2,3,4,6 Tetrachloroanisol ou TeCA. Lorsqu’elle est présente dans le vin, on retrouve alors une odeur de moisi ou de poussière. Elle est responsable des goûts de bouchon sur les vins n’ayant jamais été en contact avec du liège.
La molécule c s’appelle le 2,4,6 Tribromoanisole ou TBA. Ici, lorsque cette molécule se trouve dans le vin, ce sont des notes de moisi ou iodées que l’on retrouve. Il s’agit d’un des plus puissants contaminants identifiés.
Comment SE FORMENT ces molécules ?
Les TCA (appelons-les par leurs petits noms cela sera plus facile) sont synthétisés à partir des chlorophénols sous l’action des moisissures. Ces derniers sont formés à partir du chlore provenant des insecticides utilisés sur les chênes lièges ou sur les bois de charpente; des produits de nettoyage utilisés dans les chais …
Les TeCA proviennent aussi des chlorophénols sous l’action des moisissures (cela nous rappelle quelque chose ;-)) dans l’atmosphère humide des chais. Ces chlorophénols proviennent des produits longtemps utilisés dans le traitement du bois, aujourd’hui interdits. Le vin peut être contaminé par l’air ou par contact avec des matériaux eux-mêmes contaminés (bentonites, bouchons…).
Les TBA sont issus de la dégradation microbiologique de tribromophénols qui ont, dans certains pays, remplacé les chlorophénols dans le traitement des bois.
On parle donc de goût de bouchon ou assimilé

Car vous l’aurez donc compris, le bouchon en liège n’est pas le seul responsable du « goût de bouchon » !
Il peut être dû également à une contamination du vin par l’air du chai, par exemple lors de l’élevage en barrique, ou encore lors d’une filtration (sur un filtre mal rincé par exemple).
Des analyses du vin problématique peuvent être menées par le vigneron pour essayer de trouver la cause de cette contamination.
Si on retrouve dans le vin des TeCA et TBA cela indique souvent une contamination par l’air ou le bois, dans 95 % des cas le bouchon sera alors mis hors de cause.
Si on retrouve des TCA, cela ne veut pas forcément dire que le bouchon est responsable. Il faut alors analyser ce dernier pour voir si il relargue des TCA/ Si ce n’est pas la cas, le bouchon est aussi mis hors de cause !

Et la santé DANS TOUT CELA ?
Pas d’inquiétude à avoir, hormis le sentiment de déception qui peut parfois gâcher pendant quelques minutes (heures pour certains) une soirée, il n’y a pas de risque pour la santé à goûter un vin bouchonné !
des solutions pour éliminer le goût de bouchon ?
Malheureusement, nous ne connaissons pas de méthodes efficaces pour éliminer le goût de bouchon.
Vous lirez parfois que l’on peut y arriver avec du cellophane.
Cette méthode avait une certaine efficacité avec un type de cellophane spécifique, mais depuis les années 2000, la composition de ce dernier a été modifiée et maintenant il ne capte plus les molécules responsables du goût de bouchon.
Dans tout les cas pour l’avoir testé à plusieurs reprises (avec du cellophane courant), je n’ai jamais constaté de résultats probants.
On vous conseillera parfois d’aérer le vin pour éliminer cette odeur. Or s’il s’agit réellement d’un goût de bouchon, cette aromatique ne fera que s’accentuer avec l’aération. C’est donc une très mauvaise idée ! En revanche, si votre vin s’améliore avec l’aération et gagne en aromatique, il était alors peut-être réduit, plutôt que bouchonné.
Ne jetez pas pour un autant votre vin !
Vous pouvez l’utiliser pour faire des sauces par exemple, mais attention il faut que la sauce soit sous for,e de réduction pour réussir à éliminer les arômes de liège.
Si vous n’êtes pas sûr que la bouteille soit bouchonnée
- vérifiez que le vin est bien fermé avec un bouchon en liège
- au nez le vin aura une odeur de moisi, de liège. Pour confirmer votre première impression : rincez votre verre (et votre palais) avec de l’eau, sentez votre avant-bras pour remettre votre odorat à zéro et sentez à nouveau.
- en bouche, vous trouverez des notes de papier mâché. Si au début, cette odeur n’est pas trop importante, elle augmente avec l’aération. Attendez quelques instants puis re-dégustez.
- faites goûter à un.e ami.e si vous avez encore un doute.
Si votre impression est confirmée, n’hésitez pas à prévenir le serveur au restaurant. Il vous apportera sans aucun souci une nouvelle bouteille.
Si vous êtes chez vous, vous pouvez faire remonter l’information aux vignerons ou aux cavistes. Cette dernière est importante pour les professionnels car, pour eux aussi, une bouteille bouchonnée est une énorme frustration. Ils ont travaillé pendant des mois, pour vous faire déguster le meilleur vin possible, et rien n’est plus décevant que de voir son travail gâché par un problème de goût de bouchon !
Sources :
Institut Français de la Vigne et du Vin Occitanie : fiche « Les goûts de bouchon »
Bien compris que le bouchon en liège n’est pas toujours à incriminer mais pour plus de sécurité (politique de précaution que nous adorons) ne faut’il pas privilégier les bouchons dits « synthétiques »? mais peut être présentent’ils d’autres inconvénients…. et puis nos amis européens portugais,gros fournisseur de liège ne seront pas contents. Et « sentir » le bouchon ne fait’il pas partie du folklore de la dégustation?
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Les bouchons synthétiques sont, en effet, une alternative pour limiter les risques de goût de bouchon ! Un article arrive bientôt pour évoquer les différents types de bouchage (leurs qualités et inconvénients).
Même si le goût de bouchon fait parti de l’imaginaire de la dégustation, lorsque cela nous arrive nous sommes toujours un peu déçus, non ? 🙂
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